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La Petite Manufacture de Poèmes

25 juillet 2012

Voyelles


 

Voyelles

A noir, E blanc, I rouge, U vert, O bleu : voyelles,


Je dirai quelque jour vos naissances latentes :


A, noir corset velu des mouches éclatantes


Qui bombinent autour des puanteurs cruelles,

 

Golfes d'ombre ; E, candeurs des vapeurs et des tentes,

Lances des glaciers fiers, rois blancs, frissons d'ombelles ;

I, pourpres, sang craché, rire des lèvres belles

Dans la colère ou les ivresses pénitentes ;

 

U, cycles, vibrements divins des mers virides,

Paix des pâtis semés d'animaux, paix des rides

Que l'alchimie imprime aux grands fronts studieux ;

 

O, suprême Clairon plein des strideurs étranges,

Silences traversés des Mondes et des Anges :

- O l'Oméga, rayon violet de Ses Yeux !

 

Vocabulaire

 qui bombinent : tournoyer en bourdonnant pour un insecte

des mots qui font penser à cette expression :

bombé : qui a une forme arrondie, renflée.

bombinette : petite bombe

bombarde : instruments à vent en bois, à hanche double, de tonalité grave.

bombardon : le plus grave des instruments de la famille des  bombardes.

 

vibrement :  fait de vibrer, pour un objet

des mots qui font penser à cette expression :

vibration, vibrato, vibrer…….. et aussi : librement

 

viride :  une rare nuance de vert 

Le vert viride ou viridien est un vert bleuté et transparent.

des mots qui font penser à cette expression :

vivid (anglais) : vif, très net,  très vivant, pénétrant (On peut sentir que le R donne au mot un aspect plus acide, plus rugueux que le mot en anglais.)

viril : propriété du masculin, qui exprime l’énergie, la fermeté, la force.

 

strideur : bruit strident

des mots qui font penser à cette expression :

strident : se dit d’un son aigu, perçant.

stridence : caractère d’un son strident.

stridor : bruit aigu lors de l’inspiration dans certaines affections du larynx.

stridulant : qui fait entendre un bruit aigu.

 mais aussi : clameur, ardeur, 

 

Traduction

 

母音(第1稿)

 

A は黒、E は白、I は赤、U は緑、O は青。母音よ、


ぼくはいつか君たちの隠れた誕生を語ろう。


A は、ひどい悪臭のまわりをブンブン飛ぶ


きらめくハエの毛むくじゃらの黒いコルセット、


 

影の入り江。E は靄とテントの身震い、


高慢な氷の槍、白い光線、散形花の震え。


I は、緋色、吐かれた血、


怒りか贖罪の陶酔の中の美しい唇の笑い、


  

U は、周期、青緑の海の神々しい震え、


 動物の点在する放牧地の平和、錬金術が、


学究の広い額に刻む、皺の平和。


  

O は不可思議なかん高い音に満ちた至高の「ラッパ」、


「この世」と「天使界」を渡る沈黙…

O はオメガ、彼女の目のすみれ色の光線!

 

Fabriquons un poème :

 Consonnes !

 B, C, D, F, G, H, J, K, L, M, N, P, Q, R, S, T, V, W, X, Z

  • Nous allons chercher des mots contenant ces consonnes, les répéter, répéter,  et observer les sensations que ces consonnes évoquent.
  • Sens :  vue / ouïe / goût / odorat / toucher : cherchons des mots les évoquant.
  • Choisissons 5 mots correspondant à chaque sens pour exprimer les sensations provoquées par la répétition des consonnes. (on peut s’aider d’un dictionnaire japonais / français).
  • Inventons des mots avec plusieurs idées sur le modèle de « bombiner », « vibrement », « viride », « strideur »
  • Maintenant, nous allons nous entrainer à déclamer le poème fabriqué !

 

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28 juin 2012

Le bateau ivre Arthur Rimbaud

Le bateau ivre  (Arthur Rimbaud)

Récité par Philippé Léotard

http://www.youtube.com/watch?v=A3lpN6CqV3g

 

Récité par Gérard Philippe

http://www.youtube.com/watch?v=q9vfI-hadFE

 

 Le bateau ivre

Comme je descendais des Fleuves impassibles,


Je ne me sentis plus guidé par les haleurs :


Des Peaux-Rouges criards les avaient pris pour cibles,


Les ayant cloués nus aux poteaux de couleurs.


 

J'étais insoucieux de tous les équipages,


Porteur de blés flamands ou de cotons anglais.


Quand avec mes haleurs ont fini ces tapages,


Les Fleuves m'ont laissé descendre où je voulais.


 

Dans les clapotements furieux des marées,


Moi, l'autre hiver, plus sourd que les cerveaux d'enfants,


Je courus ! Et les Péninsules démarrées


N'ont pas subi tohu-bohus plus triomphants.


 

La tempête a béni mes éveils maritimes.


Plus léger qu'un bouchon j'ai dansé sur les flots


Qu'on appelle rouleurs éternels de victimes,


Dix nuits, sans regretter l'œil niais des falots !


 

Plus douce qu'aux enfants la chair des pommes sûres,


L'eau verte pénétra ma coque de sapin


Et des taches de vins bleus et des vomissures


Me lava, dispersant gouvernail et grappin.


 

Et dès lors, je me suis baigné dans le Poème


De la Mer, infusé d'astres, et lactescent,


Dévorant les azurs verts ; où, flottaison blême


Et ravie, un noyé pensif parfois descend ;


 

Où, teignant tout à coup les bleuités, délires


Et rhythmes lents sous les rutilements du jour,


Plus fortes que l'alcool, plus vastes que nos lyres,


Fermentent les rousseurs amères de l'amour !


 

Je sais les cieux crevant en éclairs, et les trombes


Et les ressacs et les courants : je sais le soir,


L'Aube exaltée ainsi qu'un peuple de colombes,


Et j'ai vu quelquefois ce que l'homme a cru voir !


 

J'ai vu le soleil bas, taché d'horreurs mystiques,


Illuminant de longs figements violets,


Pareils à des acteurs de drames très antiques


Les flots roulant au loin leurs frissons de volets !


 

J'ai rêvé la nuit verte aux neiges éblouies,


Baiser montant aux yeux des mers avec lenteurs,


La circulation des sèves inouïes,

Et l'éveil jaune et bleu des phosphores chanteurs !


 

J'ai suivi, des mois pleins, pareille aux vacheries


Hystériques, la houle à l'assaut des récifs,


Sans songer que les pieds lumineux des Maries


Pussent forcer le mufle aux Océans poussifs !


 

J'ai heurté, savez-vous, d'incroyables Florides


Mêlant aux fleurs des yeux de panthères à peaux


D'hommes ! Des arcs-en-ciel tendus comme des brides


Sous l'horizon des mers, à de glauques troupeaux !


 

J'ai vu fermenter les marais énormes, nasses


Où pourrit dans les joncs tout un Léviathan !


Des écroulements d'eaux au milieu des bonaces,


Et les lointains vers les gouffres cataractant !


 

Glaciers, soleils d'argent, flots nacreux, cieux de braises !


Échouages hideux au fond des golfes bruns


Où les serpents géants dévorés des punaises


Choient, des arbres tordus, avec de noirs parfums !


  

J'aurais voulu montrer aux enfants ces dorades


Du flot bleu, ces poissons d'or, ces poissons chantants.


- Des écumes de fleurs ont bercé mes dérades


Et d'ineffables vents m'ont ailé par instants.


 

Parfois, martyr lassé des pôles et des zones,


La mer dont le sanglot faisait mon roulis doux


Montait vers moi ses fleurs d'ombre aux ventouses jaunes


Et je restais, ainsi qu'une femme à genoux...


 

Presque île, ballottant sur mes bords les querelles


Et les fientes d'oiseaux clabaudeurs aux yeux blonds.


Et je voguais, lorsqu'à travers mes liens frêles


Des noyés descendaient dormir, à reculons !


 

Or moi, bateau perdu sous les cheveux des anses,


Jeté par l'ouragan dans l'éther sans oiseau,


Moi dont les Monitors et les voiliers des Hanses


N'auraient pas repêché la carcasse ivre d'eau ;


 

Libre, fumant, monté de brumes violettes,


Moi qui trouais le ciel rougeoyant comme un mur


Qui porte, confiture exquise aux bons poètes,


Des lichens de soleil et des morves d'azur ;


 

Qui courais, taché de lunules électriques,


Planche folle, escorté des hippocampes noirs,


Quand les juillets faisaient crouler à coups de triques


Les cieux ultramarins aux ardents entonnoirs ;


 

Moi qui tremblais, sentant geindre à cinquante lieues


Le rut des Béhémots et les Maelstroms épais,


Fileur éternel des immobilités bleues,


Je regrette l'Europe aux anciens parapets !


 

J'ai vu des archipels sidéraux ! et des îles


Dont les cieux délirants sont ouverts au vogueur :


- Est-ce en ces nuits sans fonds que tu dors et t'exiles,


Million d'oiseaux d'or, ô future Vigueur ?


 

Mais, vrai, j'ai trop pleuré ! Les Aubes sont navrantes.

Toute lune est atroce et tout soleil amer :


L'âcre amour m'a gonflé de torpeurs enivrantes.


Ô que ma quille éclate ! Ô que j'aille à la mer !


 

Si je désire une eau d'Europe, c'est la flache


Noire et froide où vers le crépuscule embaumé


Un enfant accroupi plein de tristesse, lâche


Un bateau frêle comme un papillon de mai.


Je ne puis plus, baigné de vos langueurs, ô lames,


Enlever leur sillage aux porteurs de cotons,


Ni traverser l'orgueil des drapeaux et des flammes,


Ni nager sous les yeux horribles des pontons.

 

Vocabulaire

haleurs : Ceux qui halent, remorquent un bateau à partir des berges.

haler : Remorquer un bateau / tirer avec force sur une corde

démarrées Qui ont rompu les amarres.

 amarres : cordes pour amarrer, c’est à dire accrocher, faire tenir un bateau à la berge.

 tohu-bohus : Bruits, tumultes

 falot : Synonyme de fanal : grande lanterne autrefois utilisée comme signal.

 sûres : Acides.

 grappin : Ancre de petite embarcation / crochet d’abordage.

 lactescent : Qui devient laiteux.

 bleuités Ayant une couleur laiteuse.

 rutilement : On dit aussi rutilance : caractère de ce qui est rouge ardent, ou qui brille d’un vif éclat (langage soutenu).

 rousseurs : couleur rousse / tache rousse sur le papier, dûe à l’humidité.Taches de rousseur : petits points roux sur la peau des gens aux cheveux roux.

 ressac : Choc des vagues qui se brisent entre elles après avoir heurté un obstacle.

 figement : Fait de se figer u d’être figé.

 volets : Panneau qui sert à fermer les ouvertures (fenêtres, portes).

 phosphores : Substances ayant la particularité d’être lumineuses dans le noir.

 vacheries : Familièrement, méchanceté ou chose désagréable.

 mufle : Extrémité du museau de certains mammifères (chevaux, vaches, ânes, etc…)

 florides : Qualifie une couleur rouge vif.

 glauques : D’une couleur entre le vert et le bleu.

 Léviathan : Monstre marin mentionné par la Bible. Ce nom avait été donné à un gigantesque bateau à vapeur anglais en 1853. (cf. Victor Hugo in La légende des siècles :  « Pleine mer »).

 bonace : Calme plat en mer, avant ou après l’orage.

cataractant : Du mot cataracte : Chute d’eau très importante, forte cascade.

 nacreux : Du mot nacre, nacré : irisé comme la couleur de la nacre (真珠の色).

 punaises : Insectes carnassiers des eaux stagnantes, à l’odeur fétide.

fétide : Odeur très désagréable).

 dérades : Sorties de rade.

rade : Bassin artificiel ou naturel dans lequel mouillent les navire. Pour un bateau, mouiller signifie jeter l’ancre, accoster.

 ineffables : Qu’on ne peut exprimer par des mots.

 roulis : Mouvements d’un bateau, d’un bord à l’autre.

 clabaudeurs : Malveillants.

 anses : Petites baies peu profondes. On peut imaginer que les cheveux sont les algues qui poussent dans ce genre de petite baies.

 éther : Le ciel, l’espace le plus pur (terme ancien).

 Monitors : Navires de guerre américains.

 Hanses : Anciennes compagnies maritimes et commerciales constituées au Moyen Age, entre certains pays d’Europe.

 lichen : Botanique : végétal formé par l’association d’un champignon et d’une algue vivant en symbiose.

Médecine : éruption cutanée de boutons prurigineux.

prurigineux : Qui provoque des démangeaisons (かゆみ)

 morves : Sécrétions nasales / maladie du cheval.

 lunules : Taches blanches sur les ongles en forme de demi-lune (爪の半月).

 hippocampe : タツノオトシゴ.

 trique : Gros bâton utilisé comme une arme.

 ultramarins : De couleur bleu outremer (ウルトラマリン).

 rut : Période pendant laquelle les mammifères sont entraînés par l’instinct de reproduction. / Famillier :  excitation érotique.

 Béhémots : Bêtes prodigieuses mentionnées dans la Bible.

 Maelstroms :  Gouffres marins.

 sidéraux : Sidéral : relatif aux astres, aux corps célestes.

 vogueur : Vieux mot pour rameur (quelqu’un qui rame pour faire avancer un bateau).

 vigueur : Force, énergie morale ou physique.

 âcre : Irritant au goût et à l’odorat.

 quille : Partie de la coque du bateau qui est sous l’eau et qui s’enfonce dans l’eau pour faire tenir droit le bateau.

 flache : Mare d’eau dans un bois, dont le sol est argileux.

Flaque d’eau stagnante.

 ponton : Plate-forme flottante, servant de débarcadère ou d’embarcadère.

Navire désaffecté servant de dépôt, de prison, etc…

 

Traduction

 

酔いどれ船拙訳

 

一隻の船である俺は悠然たる川を下っていく


もはや水夫たちが俺を操ることはない


 けばけばしいインディアンどもが奴らをひっ捕まえ


 色鮮やかな磔台に裸のまま釘付けにしたからだ

 

水夫たちのことは気にかけまい


 フランドルの小麦やイギリスの綿を運んだ奴ら


 奴らともども大波に飲まれた俺は


 いまはひとり気ままに川を下っていくのだ

 

昨年の冬のことだ 獰猛な海の裂け目に向かって


 子どものように夢中になって 俺は走った


 一艘の船だにもやわぬ半島は


 勝ち誇った叫び声をあげていた

 

 海の上で甦った俺を 嵐が祝福した


 コルクよりも軽く 俺は波頭を踊り狂った


 捕らえられたら永遠に逃れられぬ恐ろしい波


 十日の間 俺は灯台の光を頼りに迷い続けた

 

 甘酸っぱいりんごの果肉よりも更に甘く


 瑠璃色の水が俺の体内にしのびこんでくる


 ワインのしみも飛び散ったげろも洗い流し


 はしごも碇もさらっていく

 

 俺は海水にどっぷりとつかり 海の歌を聞く


 星空を映し出した海は群青色に輝き


 俺の青ざめた喫水線のあたりを


 溺れた男が夢見ながら流れていく

 

すると突然 海を青く染めながら 

 けだるくスローなリズムが日の光を浴びて


 アルコールより強烈に 音楽より心広く


 褐色の辛い愛を醸成する

 

 俺は稲妻が空を引き裂き


 海が迸り上がるのを見る


 夕べに続いて夜明けがきて


 さまざまなことどもが次々と起こった

 

 低く垂れた太陽は紫の斑をまとい


 神秘的な恐怖に彩られている


 波は古代劇の役者のように


 はるか遠くで鎧戸のきしむ音を立てる

 

 俺は夢見る 緑の夜は雪のように輝き


 ゆっくりと海に向かって接吻するのを


 かつてない生気がみなぎりわたり


 金色やブルーに 燐が揺らめき歌うのを

 

 来る月もまた来る月も 波のうねりが帆を叩く


 ヒステリーの牝牛の群れのように


 かのマリア様の輝ける足が


 海の轡など蹴飛ばしあそばさるのも知らずに

 

 かくするうちに 俺はフロリダにたどり着いた


 人間の皮にパンサーの目と花が混じりあった土地だ


 虹は引き伸ばされた手綱のように広がり


 水平線の下で羊の群れに溶け合った

 

 広大な沼地が沸騰し


 魚簗にかかったリバイアサンが腐りかけている


 静寂の中を水が渦巻き


 深淵に向かって流れ落ちていく

 

 氷河 銀色の太陽 真珠の波 灼熱した石炭色の空


 難破船の残骸が湾の底に横たわる


 蛆虫の餌食になった大蛇が


 捩れた枝から異臭を放ちながら落ちていく

 

 イルカたちを 子どもらに見せてやりたい


 青い海を泳ぐ 黄金の歌う魚たちよ


 あいつらの立てる飛沫が俺を揺さぶり


 言いようのない風が俺に翼を運んでくれる

 

 時には 極地の旅に飽きた順礼


 海のため息が俺の不安をなだめてくれる


 海が俺に向かって盛り上がると 

 俺はその上に横たわる 膝まづく女のように

 

 まるで島にいるようだ 俺のいる浜辺に向かって


 けたたましい鳥たちが糞をたらしていく


 俺はあてもなく漂流する


 溺れた男が索条を越えて船尾のほうへ流れていった

 

 俺は入り江の草むらの中で迷子になった船


 ハリケーンに吹き飛ばされ 鳥も飛ばない空中にさまよう

 
俺の残骸は 泥酔して水を被り


 海難監視船もハンザの船も助けてはくれぬだろう

 

 自由気ままに煙を吐き 紫色の霧から起き上がった俺は


 赤く染まった空の壁を突き抜ける


 そこには 詩人たちも美味だというものがある


 海の色と溶け合った太陽の苔瘡

 

 星々の電気を浴びて俺は走る


 竜の落とし子をエスコート役にして


 すると七月の大気は棍棒の一撃を以て


 ウルトラマリンの空を赤いジョウロに流し込むのだ

 

 俺はおののき 遠くにベヘモスのうなり声を聞く


またメールストレームの暗い深淵


 死をつむぎだす永遠の深淵を


 今の俺には懐かしいのだ ヨーロッパとそれを囲む古い墻とが

 

 だが俺は十分すぎるほど涙した 夜明けが痛い


 月は残忍で 太陽は昇るたびに辛辣だ


 愛が俺を飲み込んで麻痺させる


 船体よ裂けよ! 海の藻屑と消えん! 

 

 俺は散りばめられた無数の星を見る


 島々を空が覆い すべての船乗りを迎え入れる


 寝ているのかお前たちは この底なしの夜の中で


数知れぬ黄金の鳥たちよ 未来を生きるものたちよ

 

ヨーロッパに俺の浮かびたい水面があるとしたら


それは黒くて冷たい水たまり


悲しみに蹲った子どもが芳しい黄昏に向かって


5月の蝶のように壊れやすい船を浮かべる水たまり

 

 波よ お前の倦怠に漬かってしまった俺は


 もはや綿を運ぶ航海に出ることはできぬ


 旗やペナントをはためかして走ることも


 廃船を尻目に航海することもできぬ

 

 

27 novembre 2011

SILENCE

SILENCE  Baronne de Baye : « L’âme brûlante »

Nous nous taisons : c’était l’heure troublante et chaude

Où le soleil frémit sous les rideaux croisés,

L’heure lourde où l’amour, dans l’air assoupi, rôde…

Une rose effeuillait ses parfums apaisés.

 

Vous ne me disiez rien de vos tristes pensées.

Je ne vous disais rien de mes amers chagrins,

Mais le temps s’écoulait entre nos mains pressées

Comme un collier de deuil dont on compte les grains.

 

Nous nous taisions, penchés sur le silence tendre ;

Une caresse errait en cette obscurité,

Et je sentais mon âme éperdument se tendre

Vers votre âme tremblante, éprise de clarté.

L’arôme de la fleur passait, tel un sourire ;

La chambre s’emplissait d’espoir et de regret :

Nous pensions les mots doux que nous n’osions pas dire,

Nous nous taisions, gardant chacun notre secret…

 

Ô silence ! c’était l’heure troublante et chaude

Où le soleil frémit sur les rideaux croisés,

L’heure lourde où l’amour, dans l’air assoupi rôde…

Une rose effeuillait ses parfums apaisés.

 

La Baronne de Baye (1854 - ?) : Poétesse de la fin du XIXe – début du XXe siècle, stricte discipline des Parnassiens, ses principaux recueils de poèmes sont :  « Grisailles et Pastels » (1896), « Les heures aimées » (1900), « L’âme brûlante » (1905).

 

 

沈黙」            

 

バイ男爵夫人 「ざわめく心」より

 

 

わたしたちは 黙り込む それは悩ましく熱い時間だった

 

日の光が 合わされたカーテンの陰でゆらめいた

 

気だるさのなかを 愛がさまよう 重たい時間

 

一輪の薔薇が かすかな香りを散らした

 

 

 

あなたはわたしに何も語らなかった その辛い思いを

 

わたしはあなたに何も語らなかった この苦い痛みを

 

なのに時は流れ去った 握ったふたりの手の間を

 

祈りを数えるロザリオの数珠のように

 

 

 

わたしたちは 黙り込んだ 柔らかな沈黙に身をゆだね

 

その昏(くら)さのなかに 愛撫がさまよった

 

そして私は感じた この狂おしい心が 張りつめていることを

 

あなたの揺れる心 光に魅せられた心の側(かたわら)で

 

  

 

花の芳香が漂った 微笑みのように

 

その部屋は希望と悔恨に満ちていた

 

口には出せない甘い言葉を心に浮かべ

 

わたしたちは黙り込んだ それぞれの秘密を抱えて

 

 

 

ああ沈黙 それは悩ましく熱い時間だった

 

日の光が 合わされたカーテンの陰でゆらめいた

 

気だるさのなかを 愛がさまよう 重たい時間

 

一輪の薔薇が かすかな香りを散らした

 

 Traduction : Masumi KAWASAKI

 

バイ男爵夫人(1854~?)

19世紀末~20世紀初頭、高踏派の本流を汲む女流詩人。その代表的詩集に

「グリザイユとパステル」(1986)、 「愛された時間」(1900)、「ざわめく心」(1905)

訳注・・・「グリザイユ」は美術用語で、灰色の濃淡・明暗だけで描く技法のこと

 

 

27 novembre 2011

RECETTE

RECETTE  Eugène Guillevic  : « Avec »

                                                  Prenez un toit de vieilles tuiles

                                                 un peu avant midi.

 

                                            Placez tout à côté

                                          un tilleul déjà grand

                                         remué par le vent.

 

                                    Mettez au-dessus d’eux

                                 un ciel bleu, lavé

                              par les nuages blancs

 

                      Laissez-les faires,

                  Regardez-les 

 

Eugène Guillevic (1907-1997) : Attaché à rendre tout l’univers (les choses comme les faits) concrets et palpables, Guillevic produit une œuvre d’un lyrisme étonnamment concis. « Carnac » (1961) est un long dialogue entre le poète et la mer.

 

レシピ

ウージェーヌ・ギルヴィック:『Avec

 

 

 

                                                        古い瓦のある家を選びます

                                                     昼の少し前に。

 

                                                すぐ隣に植えます

                                            もう大きくなって

                                         風に揺れるシナノキを。

 

                                    その上に置きます

                               白い雲に洗われた

                          青い空を

 

                  あとは彼らに任せて、

              眺めていましょう

 

 

Traduction : Ayumi YOSHIDA



27 novembre 2011

LE FLACON

LE FLACON   Charles François Panard

Que mon

Flacon

Me semble bon !

Sans lui

L’ennui

Me nuit,

Me suit ;

Je sens

Mes sens

Mourans

Pesans

Quand je le tiens,

Dieux ! Que je suis bien !

Que son aspect est agréable !

Que je fais cas de ses divins présens !

C’est de son sein fécond, c’est de ses heureux

Flancs que coule ce nectar si doux, si délectable,

Qui   rend   tous   les   esprit,   tous   les   cœurs   satisfaits.

Cher    objet   de   mes    vœux,   tu   fais   toute   ma   gloire ;

Tant   que   mon   cœur   vivra   de   tes   charmans   bienfaits

Il  s a u r a   c o n s e r v  e r    l a  f i d e l l e   m é m o i r e.

Ma     muse  à    te    louer     se    consacre    à      jamais.

Tantôt   dans   un   caveau,   tantôt   sous   une  treille,

Ma  lyre,  de  ma  voix  accompagnant  le  son,

Répétera  cent  fois  cette  aimable  chanson :

Règne sans fin ma charmante bouteille ;

Règne sans fin mon cher flacon.

 

 

Charles François Panard (1694-1765) : Poète, chansonnier et auteur de comédie, l’homme était un bon vivant, insouciant et jovial. Ami de Pierre Gallet, de Charles Collé et d’Alexis Piron, ils organisaient ensemble de joyeuses soirées copieusement arrosées où ils composaient des chansons égrillardes. Ce fut l’origine de la première Société du Caveau, une célèbre goguette parisienne créée en 1729, l’ancêtre du cabaret et dont la tradition chansonnière se perpétuera jusqu’en 1939.

Deux choses illustrent le XVIIIe siècle, « l’Encyclopédie et le Caveau ». Le siècle de Voltaire, Montesquieu, Rousseau, Buffon est aussi celui de Panard, de Gallet, de Collé et de Piron. Les premiers sont les piliers de l’humanisme, les autres sont les quatre piliers de la chanson.

Au XVIIe siècle, Pascal avait fixé la prose française, Bossuet l’oraison funèbre, Racine la tragédie et Molière la comédie. Cent ans plus tard, Panard, Gallet, Piron et Collé fixèrent la chanson et ouvrirent la voie dans laquelle elle évolua pendant les trois siècles suivant.

 

 

酒瓶

シャルル・フランソワ・パナール

 

 

ああ何て

イカした

オレの酒ビン!

お前なしで

心の憂さは

まったく

晴れない

俺はもう

死ぬほど

退屈だぜ

それでも

酒瓶を持てば

オレはゴキゲン!

その素晴らしい容姿!

この上ない神からの贈り物!

ふくよかな胸元に  たっぷりとした腰つき

かくも甘く  かくも美味な美酒をとくとくと注ぎ

この酒瓶には誰の心も幸せにする秘薬が入っている

我が願い事は一つだけ  お前はオレの誉れのすべてなのさ

お前の魅惑的な恩恵のお陰で  オレの心が生き続ける限り

正確な記憶を保ち続けるすべを知っていることだろう

我が詩の女神はお前を賞賛し永遠に身を捧げるだろう

ある時は地下蔵で  またある時はブドウの木の下で

 我が詩想は  音を奏でる我が歌声となりながら

この素敵な歌は 百回歌われるだろう

我が魅惑の酒瓶の君臨に終わりなし

我が愛しの酒瓶の君臨に終わりなし

 

Traduction : Toshiko OYAMA

 

シャルル・フランソワ・パナール (1694-1765) : 詩人、シャンソニエ(寄席などで自作の風刺的な歌や小話などを聞かせる芸人)、喜劇作家、暢気で陽気な美食家でもあった。

 

友人のピエール・ギャレ、シャルル・コレ、アレクシス・ピロンたちと大いに酒を飲み交わす陽気な夜会を共に開催し、そこで彼らは卑猥な歌を作った。キャバレーの前身となる最初の小さな穴倉、

 

キャボーは、1729年に1人の有名なほろ酔いのパリっ子によって1729年に創られ、シャンソニエの伝統は1939年まで守り続けた。18世紀を彩ったものには《百科事典とキャボー》の二つがある。

 

ボルテール、モンテスキュー、ルソー、ビュフォンなどに代表される博識のヒューマニズムの中心人物たちであり、パナール、ギャレット、コレ、ピロのシャンソンの礎を築いた4人の大御所たちの世紀である。17世紀に、パスカルはフランス語の散文を、ボスエは追悼演説を、ラシーヌは悲劇を、そしてモリエールは喜劇を定着させた。さらにその百年後、パナール、ギャレット、ピロンとコレは、

 

シャンソンを定着させ、シャンソンはその後三世紀にわたり進化を続けた。

 

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27 novembre 2011

LA ROSE THÉ

12. LA ROSE THÉ  Théophile Gauthier (1811-1872) « Emaux et camées »

 

La plus  délicate des roses


Est, à coup sûr, la rose-thé.


Son bouton aux feuilles  mi-closes


De carmin à peine est teinté.


 

On dirait une rose blanche


Qu'aurait fait rougir de pudeur,


En la lutinant sur la branche,


Un papillon trop plein d'ardeur.


 

Son  tissu rose et diaphane


De la chair a le velouté ;


Auprès, tout incarnat se fane


Ou prend de la vulgarité.


 

Comme un teint aristocratique


Noircit les fronts bruns de soleil,


De ses sœurs elle rend rustique


Le coloris chaud et vermeil.


 


Mais,  si  votre main qui s'en joue,


À quelque bal, pour son parfum,


La rapproche de votre joue,


Son frais éclat devient commun.


 

Il n'est pas de rose assez tendre


Sur la palette du printemps,


Madame, pour oser prétendre


Lutter contre vos dix–sept ans.


 

La peau vaut mieux que le pétale,

Et le sang pur d'un noble cœur


Qui sur la jeunesse s'étale,


De toutes les roses est vainqueur !

26 septembre 2010

LA CIGALE ET LA FOURMI

06. LA CIGALE ET LA FOURMI Jean de la Fontaine (1621-1695) "Fables"

La Cigale, ayant chanté

Tout l'été,

Se trouva fort dépourvue

Quand la bise fut venue :

Pas un seul petit morceau

De mouche ou de vermisseau.

Elle alla crier famine

Chez la Fourmi sa voisine,

La priant de lui prêter

Quelque grain pour subsister

Jusqu'à la saison nouvelle.

"Je vous paierai, lui dit-elle,

Avant l'Oût, foi d'animal,

Intérêt et principal. "

La Fourmi n'est pas prêteuse :

C'est là son moindre défaut.

Que faisiez-vous au temps chaud ?

Dit-elle à cette emprunteuse.

- Nuit et jour à tout venant

Je chantais, ne vous déplaise.

- Vous chantiez ? j'en suis fort aise.

Eh bien! dansez maintenant.

26 septembre 2010

IL PLEURE DANS MON CŒUR

 IL PLEURE DANS MON CŒUR Paul Verlaine (1844-1896) "Romances sans paroles"

Il pleure dans mon coeur
Comme il pleut sur la ville ;
Quelle est cette langueur
Qui pénètre mon coeur ?

Ô bruit doux de la pluie
Par terre et sur les toits ! 
Pour un coeur qui s'ennuie,
Ô le chant de la pluie !

Il pleure sans raison
Dans ce coeur qui s'écoeure.
Quoi ! nulle trahison ?...
Ce deuil est sans raison.

C'est bien la pire peine
De ne savoir pourquoi
Sans amour et sans haine
Mon coeur a tant de peine !
26 septembre 2010

CORRESPONDANCES

CORRESPONDANCES Charles Baudelaire (1821-1867) "Les fleurs du mal"

La Nature est un temple où de vivants piliers
Laissent parfois sortir de confuses paroles;
L'homme y passe à travers des forêts de symboles
Qui l'observent avec des regards familiers.

Comme de longs échos qui de loin se confondent
Dans une ténébreuse et profonde unité,
Vaste comme la nuit et comme la clarté,
Les parfums, les couleurs et les sons se répondent.

II est des parfums frais comme des chairs d'enfants,
Doux comme les hautbois, verts comme les prairies,
- Et d'autres, corrompus, riches et triomphants,

Ayant l'expansion des choses infinies,
Comme l'ambre, le musc, le benjoin et l'encens,
Qui chantent les transports de l'esprit et des sens.
26 septembre 2010

J'ÉCRIS POUR QUE LE JOUR

J'ÉCRIS POUR QUE LE JOUR Anna de Noailles (1876-1933) « L’ombre des jours »

J'écris pour que le jour où je ne serai plus

On sache comme l'air et le plaisir m'ont plu,

Et que mon livre porte à la foule future

Comme j'aimais la vie et l'heureuse Nature.

 

Attentive aux travaux des champs et des maisons,

J'ai marqué chaque jour la forme des saisons,

Parce que l'eau, la terre et la montante flamme

En nul endroit ne sont si belles qu'en mon âme!

 

J'ai dit ce que j'ai vu et ce que j'ai senti,

D'un cœur pour qui le vrai ne fût point trop hardi,

Et j'ai eu cette ardeur, par l'amour intimée,

Pour être, après la mort, parfois encore aimée,

 

Et qu'un jeune homme alors, lisant ce que j'écris,

Sentant pour moi son cœur ému, troublé, surpris,

Ayant tout oublié des épouses réelles,

M'accueille dans son âme et me préfère à elles...

 

La comtesse Anna-Élisabeth de Noailles, née princesse Bibesco Bassaraba de Brancovan, est une poétesse et romancière française, d'origine roumaine, née à Paris le 15 novembre 1876 et morte à Paris le 30 avril 1933. Sa tante, la princesse Hélène Bibesco, a joué un rôle actif dans la vie artistique parisienne à la fin du XIXe siècle jusqu'à sa mort en 1902. Anna est la cousine germaine des princes Emmanuel et Antoine Bibesco, amis intimes de Proust.

 

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